La contagion émotionnelle : ce virus que nous partageons tous (sans toux ni fièvre)
Vous pensez avoir évité le dernier virus qui traîne ? Pas si vite. Car un autre vous a peut-être déjà touché sans que vous le sachiez. Pas de maux de gorge. Pas de nez qui coule. Juste un frisson. Un agacement. Une bouffée de joie qui ne venait pas de vous. C’est cela, la contagion émotionnelle.
Pas besoin d’éternuer pour transmettre cette infection invisible. Un froncement de sourcil, un soupir, ou même un silence pesant suffit. Et hop, vous voilà « contaminé ».
De quoi parle-t-on exactement ?
La contagion émotionnelle est un phénomène psychologique, étudié entre autres par la chercheuse Elaine Hatfield. Elle décrit notre capacité à ressentir, sans en avoir conscience, les émotions des autres. On ne parle pas d’empathie volontaire. Il s’agit ici d’un réflexe automatique, d’une réaction en chaîne.
Un collègue arrive stressé au bureau. Il ne dit rien. Mais vous sentez la tension. Vous commencez à être nerveux, sans raison claire. Voilà, le transfert émotionnel a eu lieu. Et le pire ? Vous pouvez à votre tour le transmettre à d’autres, comme une onde qui se propage.
Comment ça fonctionne ?
L’explication est à chercher du côté de nos neurones miroirs. Ces petits malins sont situés dans notre cerveau. Ils nous permettent de ressentir ce que l’autre vit, comme si nous l’expérimentions nous-mêmes. Une grimace ? Votre cerveau l’analyse. Un ton sec ? Il l’interprète. Un sourire ? Il vous donne envie de sourire aussi.
En résumé : les émotions sont contagieuses parce que notre cerveau est câblé pour se connecter aux autres. Un outil formidable pour renforcer le lien social… mais aussi un terrain glissant en cas de tempête émotionnelle.
Pourquoi est-ce important de le savoir ?
Parce que la contagion émotionnelle agit dans tous les domaines : au travail, en famille, dans la rue, dans un open space ou un salon. Et si nous n’en avons pas conscience, nous pouvons devenir vecteurs involontaires de stress, de colère ou d’anxiété. À l’inverse, nous pouvons aussi être des porteurs sains de calme, de sérénité ou de bonne humeur.
En communication, c’est un point crucial. Quand une personne prend la parole avec confiance, elle transmet cette énergie. Quand elle est tendue, l’auditoire se crispe. D’où l’intérêt d’apprendre à gérer ses propres émotions… avant de chercher à influencer celles des autres.
Les effets pervers de cette « contamination »
Il est facile de sous-estimer l’impact des émotions négatives sur notre entourage. Pourtant, elles peuvent s’infiltrer subtilement dans un groupe, jusqu’à empoisonner l’ambiance. Quelques exemples ?
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Un chef d’équipe tendu contamine tout un service.
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Un parent inquiet transmet son anxiété à ses enfants.
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Un client agressif provoque une réaction défensive chez un salarié… qui transmettra ensuite sa frustration à ses collègues.
Et parfois, cela ne s’arrête pas là. La tension se diffuse en chaîne, comme une série de dominos émotionnels qui tombent les uns après les autres.
Comment éviter d’être un agent contaminant ?
Bonne nouvelle : il existe des outils concrets pour limiter les dégâts. Être traversé par une émotion, c’est normal. Laisser cette émotion s’imposer aux autres, c’est évitable.
Voici quelques techniques utilisées dans nos formations :
1. Le sas de décompression
Ou « comment éviter de tout ramener à la maison ».
Avant de passer du monde professionnel à la sphère personnelle, il est vital de faire une pause mentale. Cinq minutes dans sa voiture, quelques pas à pied, une respiration consciente. Cela permet de désamorcer la tension avant de la propager.
Ce sas peut être imaginaire (on se visualise en train de déposer ses émotions) ou très concret (changer de vêtements, écouter une musique, respirer). L’important est de mettre une barrière entre deux mondes émotionnels.
2. Le defusing
Le mot vient du monde des interventions d’urgence. Il s’agit ici d’un débriefing émotionnel rapide, juste après une situation tendue. En clair, on évacue à chaud ce qu’on a vécu, sans jugement ni analyse poussée.
Cela peut se faire avec un collègue, un manager ou un proche. Le but : ne pas laisser l’émotion s’installer. Mieux vaut en parler, même brièvement, que la refouler et la recracher plus tard sur quelqu’un d’autre.
3. La respiration guidée
Simple, efficace, toujours disponible.
Respirer, oui. Mais en conscience. Inspirer profondément, bloquer, expirer lentement. Trois fois. Cinq fois. Dix fois. Peu importe. Cette technique active le système parasympathique et apaise le corps et l’esprit.
Les formations en gestion des violences incluent souvent des exercices guidés pour retrouver rapidement un état de calme. Et devinez quoi ? Ça fonctionne aussi avant une réunion, un dîner de famille tendu ou un appel stressant.
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Notre formation en entreprise : « Prévention et gestion des situations de violence. – La méthode GESIVI®«
Et côté positif, alors ?
Heureusement, la contagion émotionnelle ne transmet pas que le stress. La joie, la motivation, l’enthousiasme sont aussi viraux. Vous avez sûrement déjà vécu une réunion qui traînait… jusqu’à ce que quelqu’un arrive, souriant, dynamique, et que tout change.
C’est un super pouvoir. Et comme tout super pouvoir, il demande de la maîtrise. Si vous êtes conscient de votre état émotionnel, vous pouvez choisir quoi transmettre. Ce qui revient à influencer votre environnement, sans avoir à lever la voix.
Quelques conseils pour cultiver l’émotion positive
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Prenez soin de vous : le stress non géré devient un poison que vous finirez par transmettre.
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Faites le point régulièrement : comment vous sentez-vous ? Et que risquez-vous de diffuser ?
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Faites preuve de présence : écouter l’autre, vraiment, permet d’absorber sans amplifier.
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Souriez (vraiment) : même forcé, un sourire déclenche une micro-réaction positive chez vous et chez l’autre.
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Entourez-vous bien : certaines personnes sont des « diffuseurs naturels de lumière ». Restez près d’elles.
Conclusion : un virus à apprivoiser, pas à fuir
Nous ne pouvons pas éviter la contagion émotionnelle. Elle fait partie de notre humanité. Mais nous pouvons en prendre conscience, et surtout agir pour en limiter les effets négatifs. Et si possible, en cultiver les bienfaits.
Être un relais de calme dans un monde agité, ce n’est pas être passif. C’est être fort. C’est prendre sa part de responsabilité émotionnelle. Et c’est, quelque part, faire œuvre de santé publique. Sans masque ni vaccin. Juste avec un peu de conscience, de respiration, et d’humour (quand on peut).
Alors, à votre prochaine émotion : respirez. Vous êtes peut-être en train de contaminer quelqu’un… autant que ce soit avec du positif.