Quelle est la différence entre l’agressivité de type frustrationl’agressivité instrumentale et l’agressivité pathologique ?

Une distinction cruciale puisque chacune de ces formes connaît en quelque sorte un «mode de fonctionnement» qui lui est propre. Comment les prévenir et/ou les gérer en fonction de leurs spécificités ? Voici quelques conseils. Les exemples présentés ici relèvent principalement d’un contexte policier, mais ils peuvent facilement être étendus au secteur privé, aux services de prestations sociales ou encore au domaine de la santé publique. Il s’agit en effet de techniques comportementales qui sont basiques et universellement applicables.

 

Agressivité de type frustration : être compréhensif 

L’agressivité de type frustration. Elle est la conséquence d’une accumulation de petites ou de grandes frustrations qui, pour l’individu, finissent par « exploser en son for intérieur ». Négocier, supplier, argumenter ou encore tenter de raisonner avec lui, n’apportera aucun résultat. L’agresseur se trouve dans un état tel que son champ de conscience est rétréci. Un peu comme un taureau devant lequel on agiterait un tissu rouge : « une vision en tunnel ». Il n’est, à cet instant précis, réceptif qu’à une démarche axée sur la sympathie et la compréhension. 

Ainsi, supposons que vous venez d’interpeller un automobiliste, un peu trop pressé, en raison d’un feu arrière défectueux. Si celui-ci a déjà accumulé quelques frustrations (stress au travail, dispute avec sa femme ou une déclaration d’impôts en retard), il se pourrait que l’agression soit imminente. Dans ce cas, veillez toujours à montrer une certaine empathie à l’égard de ces sentiments de frustration. Utilisez des formulations du type, je comprends que vous soyez pressé, mais nous allons régler ce problème dans les plus brefs délais. Par ce procédé, vous calmez non seulement la situation mais prévenez aussi son aggravation.

Agressivité instrumentale : mettre des limites 

Face à une agressivité instrumentale (l’agresseur tente de vous intimider). Il est absolument nécessaire de mettre les choses au clair et d’indiquer, expressément, à votre interlocuteur les limites à ne pas dépasser. Transmettez un message clair : par exemple, je suis désolé que vos papiers ne soient pas en règle mais je ne peux malheureusement rien y faire. L’agresseur peut dans ce cas se montrer plus incisif. Dès lors, il est très important de rester ferme sur sa position. Rappelez celle-ci et répétez-la autant de fois que nécessaire. N’oubliez pas que ce rappel à l’ordre a pour objectif de lui montrer les frontières à ne pas franchir. Si l’agresseur persiste, reformulez ce rappel sous forme de choix :

  • soit vous vous calmez
  • soit je ne pourrai pas vous aider davantage
  • soit vous vous asseyez maintenant
  • soit je devrai l’indiquer dans mon rapport
  • vous sortez du magasin
  • je dresse un pv.

Une telle formulation indique à l’agresseur que la conversation est terminée. En lui offrant ce type de choix fictif, vous lui donnerez le sentiment de pouvoir quitter le champ de bataille sans perdre la face. Cela se fera rarement sans insultes ou autres signes de mépris, mais l’essentiel, c’est que le conflit soit enfin clos.

Agressivité pathologique : privilégier la sécurité 

Une agressivité pathologique. Elle est due à des déficiences neurologiques et n’a ni cible ni but. Dans cette situation, il est important de garder son calme et de ne faire aucun geste brusque ou imprévisible. Maintenez une distance de sécurité entre votre interlocuteur et vous. Restez amical tout en précisant ce qui peut et ne peut pas être fait. Ne cédez en aucun cas aux comportements et aux exigences de votre interlocuteur. Tout comme pour l’agressivité instrumentale, il est nécessaire d’indiquer à l’agresseur les limites à ne pas franchir. Vous disposez de peu de marge en termes de négociation et d’argumentation. Vous devez donc présenter brièvement et clairement les conséquences auxquelles s’expose l’agresseur ; mais restez sur vos gardes…

Le caractère imprévisible de ce type d’agression rend sa prévention et son contrôle difficile, tout particulièrement en matière de sécurité :

  • assurez-vous toujours que l’agresseur n’est pas en mesure de blesser autrui (mettre tout objet dangereux hors de portée).
  • que vous disposez d’une voie de fuite et que la sécurité des autres n’est pas compromise.
  • n’hésitez pas à faire appel à un collègue, dans les plus brefs délais, pour requérir de l’aide ou une assistance médicale si nécessaire.
  • enfin, veillez également à ce que le ton de votre voix soit rassurant et apaisant…

Annemie De Boye Conseillère en sécurité Cet article se base sur l’ouvrage DE BOYE, A., Als het potje overkookt: Anger management en agressiehantering op de werkvloer, Kluwer, 2010.