Sommes-nous préparés à cette éventualité ?

Cet article est destiné aux pratiquants de self défense. Notre organisme se consacre essentiellement à la formation professionnelle pour travailler auprès des publics difficiles dans le cadre du social, du médicosocial, de l’éducation et des services du secours à la personne.

Un axe de prévention du harcèlement et des violences est maintenu pour apporter des outils spécifiques dans leur quotidien auprès des femmes (qui représentent près de ¾ de nos stagiaires dans le cadre de nos formations professionnelles).

Nous parlons de cette vidéo qui a été fortement partagée sur les réseaux. Un homme accompagné de ses enfants est dans une laverie automatique. Alors qu’il aurait demandé à une personne de porter son masque, elle est passée à tabac. Nous n’entrerons pas ici dans l’aspect contextuel. Nous ne traiterons que de l’analyse du passage à l’acte.

L’attaque en groupe est un acte qui concerne 10% des agressions commises en France (source Observatoire National Délinquance et Réponses Pénales).

Le contexte :

L’expérience de terrain des formateurs de notre équipe, forte de son expérience opérationnelle de terrain et de la série de mises en situation, permet de tirer les éléments d’analyse suivants.

Nous sortons de nos archives quelques parcours de mise en situation destinés à préparer nos stagiaires à faire prendre conscience de la difficulté du problème et de les préparer.

 

Après un parcours de plusieurs kilomètres parsemés d’agressions type, le stagiaire très fatigué est amené dans une pièce où il doit retourner au calme. Alors qu’il pense se reposer, une série d’agresseurs bondissent sur lui.

Ces mises en situations peuvent engendrer des traumatismes et blessures si elles ont menées et animées par des encadrants qui négligent certains fondamentaux de bienveillance et de sécurité.

De ces sessions de formation et des multiples mises en situation, il ressort les points clés suivants. Ces points qui nous semblent essentiels, sont faciles à coucher sur le papier ; bien moins évidents à mettre en pratique. Mais une prise de conscience reste toutefois un premier pas.

Les points clés :

Se situer dans les « 4D » (Tony BLAUER).

  • Détecter

    • « Quand on ne sent pas l’affaire, on change de trottoir ». c’est du bon sens ! Alors, dans la rue, en zone susceptible d’être «  à risque », on décroche son regard du smartphone et on reste en contact avec l’environnement.

    • Si on sent un risque et qu’on se doive d’intervenir (et si on se sent de le faire) : MS du hall d’immeuble. On alerte les secours en amont. On laisse le téléphone branché. Après, c’est trop tard !

  • Désamorcer
    • La négociation (face à une attaque en mode « hyène » peut fonctionner. Dans nos livres (1), nous soulignons qu’un groupe est composé d’individualités. L’appel à la raison peut être mis en place pour tenter de morceler les postures de chacun. Dans nos formations, nous expliquons la différence entre le(s) meneur(s) et les suiveurs.

    • Comment s’adresser à un groupe ?

    • Comment identifier les rôles de chacun ?

    • Les erreurs à ne pas commettre

    • Que dire ? Comment le dire ?

    • Les zones essentielles de protection physique

Ces points sont abordés lors de nos interventions en groupe.

  • Désengager.
  • Dès que cela vous est possible.

  • Défendre.
  • Le coup pour coup est inutile. A moins d’être une machine, vous n’aurez pas le dessus. Privilégiez la protection des zones sensibles, et les préparez vous à encaisser les coups pour se dégager et partir au plus vite. A lire cet article de Vladimir VASILIEV sur l’encaissement des coups par la respiration.

Il y a 2 types de MASS’ATTACK

  • En mode « HYENE » : le groupe « se teste », « teste » vos réactions. On remarque des prémices d’attaque portés par les « dominants » du groupe ou ceux qui ont besoin d’asseoir leur statut au sein du groupe.

    • Solutions : mettre de côté son égo.

      • Crier*

      • Fuir

      • Si impossible. Ne pas s’exposer au sein de la mêlée (c’est le cas de l’homme agressé dans la laverie). Se mettre dans un coin.

      • « Traiter » le premier qui vous agresse. Vous en servir de « bouclier humain ».

      • Fuir à la première occasion.

  • Important : « La force du loup est dans la meute ». Tant que vous pouvez parler et dialoguer avec le ou les agresseurs qui vous ont accosté, vous avez une chance d’en sortir. Il faut scinder psychologiquement le groupe. C’est difficile, mais réalisable. Nous le confirmons par notre expérience. Le premier coup parti, on passe à autre chose. Après, on fait ce que l’on peut !

Rester vigilant sur une relation humanisée. Se rappeler que « Toutes les enquêtes sérieuses…sur l’horreur ordinaire montrent que pour passer à l’acte, il faut arriver à mentalement compartimenter le camp des humains dignes d’être protégés et celui des non-humains ». Fabien TRUONG, sociologue.

Dans nos formations et grâce à nos modules de « désescalade verbale » élaborés grâce aux conseils avisés de nos partenaires spécialistes en négociation de crise (RAID), il est important d’utiliser les mots à son avantage.

  • En mode « LYNCHAGE ». La forme la plus grave où le risque de blessure ou de mort ne sont pas à exclure.

    • Risque de chute quasi certain.

    • Auto protection au sol (type close-combat, self-défense…).

    • Crier*

    • Les tentatives de relever sont toujours dangereuses.

    • Si saturation de coups : autoprotection de survie, pré positionnement en PLS risque imminent de perte de connaissance.

*Des études ont démontré que le cri, sous forme de cri de douleur peut réduire l’agressivité du ou des auteurs.

« Le risque de chute face à une mass attack est quasi certain. Il faut s’y préparer lors des entrainement »

« La protection tête cou est a privilégier. Cette protection est une des meilleures. Mettez vous sur le côté pour parer à une une LVA (libération des Voies Aériennes) si vous venez à perdre connaissance. N’hésitez ps a émettre des cris de douleur « vous êtes en train de me tuer! » pourra inciter un des membres du groupe à faire stopper l’action. »

Vous êtes plusieurs ? Le désengagement est un réel problème. Votre cohésion est essentielle. Se défendre ensemble. Se désengager en groupe. N’oublier personne. Pas de partenaire isolé. Nous abordons cet aspect lors de nos formations aux équipes (plus particulièrement les sapeurs-pompiers durant les situations d’émeute et de prise à partie).

« Qu’il s’agisse d’émotions ou de techniques, sans préparation, l’imprévisible devient insurmontable » Éric HEIP, numéro 2 du RAID, le 1er juin 2016

La vidéo ci dessus :

Il rentre de son entraînement de sport avec son matériel de self défense. Il arrive dans son hall d’immeuble dont l’environnement se dégrade depuis quelques jours. Une bande squatte le hall et une pétition a été signée. Alors qu’il s’apprête a monter dans l’ascenseur, la porte des sous sols est barrée par un individu. Il entend une voie féminine appeler à l’aide.

Pour s’entraîner correctement :

Nous sommes très mal placés pour donner des conseils présomptueux. Mis quelques points d’amélioration ou aspects à ne pas négliger pour se préparer.

  • Ne pas négliger les fondamentaux de désescalade verbale

  • Travailler la chute et le relevé tactiques

  • Condition physique : action énergivore+++. Allier chaque exercice de désengagement en course rapide

  • Travailler la perception de l’environnement : par où partir ? Ne pas oublier un collègue en partant…

  • Avoir des notions de secourisme

 

Conclusion

Associez une pensée rigide, une idéologie arrêtée et une mémoire sélective à une peur irrationnelle et vous obtenez le cocktail explosif de la haine. Une haine farouche et déshumanisée. Ajoutez un narcissisme pathologique à ce mélange hautement toxique et vous obtenez des individus capables des actes de cruauté les plus innommables parce que motivés par la haine des individus….” Joe NAVARRO, comportementaliste au FBI. .

C’est en ces mots que nous pourrions définir la personnalité de ces personnages qui ne trouvent leur force qu’en groupe. Seuls, ils ne sont rien. En groupe, ils se rattachent à l’effet de meute. Et se sentent forts. Et si nous aurions tendance à penser que c’est un travers qui ne nous concerne pas, cet effet de groupe associé à cette déshumanisation de l’autre n’épargne personne.

A ce titre, le jeu remarqué depuis quelques années où des groupes se complaisent à frapper sans raison un passant, puis le rouer de coup à plusieurs après l’avoir fait chuter par une balayette. Un jeu repéré lors des férias dans le sud de la France auprès des personnes alcoolisées. Des scènes qui sont des jeux imbéciles et dangereux et se transforment en concours vidéos postés sur les réseaux..

Il faut donc se préparer à y faire face mais avec beaucoup de modestie et d’humilité. Il faut sortir des entraînements classiques où les agressions sont menées par de gentils partenaires soucieux de votre bien être.

La mise en situation** permet de se mettre à l’épreuve et de s’éprouver sans concession face à cette réalité qui serait bien spécifique à l’être humain qui se dit « civilisé ».

Car, comme nous l’explique René GIRARD, on sait désormais que, dans la vie animale, la violence est pourvue de freins individuels. Les animaux d’une même espèce ne luttent jamais à mort ; le vainqueur épargne le vaincu. L’espèce humaine est privée de cette protection. Encore une spécificité

** GESIVI est devenu un des leaders dans la réalisation des mises en situation en contexte violent.

***« La violence et le sacré ». Editions GRASSET – 2004.

Crédit image : close combat de R et O Saint Vincent. Ed. CHIRON